Category: Livres,Romans et littérature,Livres de référence
Retour à Canossa : journal 1999 Details
Samedi 27 février, trois heures de l'après-midi. Il porte un parfum nommé Scorpio. « Je vais m'acheter un flacon de Scorpio, lui dis-je. Comme ça je n'aurai plus besoin de vous. »Mais lui, impitoyable : « ça ne marche que mélangé à ma peau. »Et en effet.Il a un beau pull-over blanc qu'il me prête, et que j'adore. Il dit qu'il va me le donner. Moi : « Mais je ne veux pas que vous me le donniez. C'est votre odeur que j'aime en lui. Prêtez-le moi de temps en temps. - Si, si, prenez-le, je vous le donne. Vous n'aurez qu'à me le repasser quelquefois, je le rechargerai... »Effectivement il me l'a laissé. Hélas, après la semaine qu'il a passée ici, le pull-over sent surtout le chien.J'ai acheté un flacon de Scorpio. Rien à faire.
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De tome en tome, on (re)découvre chacune des innombrables nuances de ce prolifique écrivain qu'est Renaud Camus. Ce journal 1999 est celui qui termine les années sentimentalement noires, esseulées, minitéliennes ; celui qui clôt un siècle et donne raison à notre homme et lie, ô combien merveilleusement, la littérature et le monde (cf. P.A. du même auteur...). On voit devant soi se dérouler les filets amoureux. On comprend le besoin d'être aimé (« ...la seule idée à laquelle nous ne pouvons pas nous faire, c'est que l'autre ne nous aime pas. Dans notre esprit, l'autre ne nous aime pas encore. Ou plutôt il nous aime déjà, mais il ne sait voir en lui son amour pour nous. L'idée que nous ne sommes pas aimés du tout est parfaitement inhabitable. Personne ne peut s'en accommoder. »). On maugrée à la vision de l'amoureux, toujours prêt à ne pas voir pour continuer le rêve. Et puis, on finit par comprendre qu'il fallait sans doute cet état amoureux et languissant pour que Renaud Camus puisse accueillir celui qui le rendra au bonheur perdu (et peut-être jamais vraiment trouvé jusque là).Si ce tome contient par ailleurs les saillies et remarques habituelles, on gardera cependant d'abord de ces pages le goût de la félicité, la pente vers une conjugalité sereine : « Connaissance par les doigts, connaissance par les lèvres, connaissance par le pas, par l'air fendu, par le bruit d'une phrase dont le sens est perdu. »
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